La réalisation d’une calligraphie demande une grande concentration, beaucoup de ressources et d’efforts énergétiques. La sérénité de l’esprit et la décontraction du corps aident notre nature à se libérer en encre sur l’espace vide du papier. Cette expression est un miroir du calligraphe, de son état psychologique, de son intelligence et de son état physique.
Plus nous sommes développés énergétiquement, plus nous sommes habiles dans nos créations et la calligraphie nous embarque dans un voyage énigmatique dans lequel nous perdons le sens du temps et du monde matériel. Comme le Qi Gong, la calligraphie nous passionne, avec ses possibilités d’expression et de recherche individuelle.
En progressant dans cet art martial à l’aide du pinceau, notre épée, nous évoluons dans le processus de compréhension et de reconnaissance de notre nature, nous enrichissons nos possibilités énergétiques.
Wang Yang Ming, un philosophe chinois (1472-1529), utilisa souvent l’image de la calligraphie, ainsi que celle du tir à l’arc, pour étayer le principe que “Connaissance et action ne font qu’un”. Dans son “Enseignement Particulier” il explique la chose suivante :
La flèche comme le pinceau symbolise le souffle-énergie (Qi – respiration).
La feuille de papier de soie comme la cible symbolise l’intention (Yi).
Le caractère-image comme la mouche de la cible symbolise l’esprit (Shen).
La position du pinceau joue un rôle primordial puisqu’elle facilite la circulation de l’énergie et de son courant à travers la main. La tenue du pinceau est complètement inhabituelle pour la main occidentale :
Le pouce (l’Empereur) doit rester vertical. L’index s’incline devant le pouce et reste décontracté (c’est le Premier Ministre agenouillé devant l’Empereur). Le mouvement du pinceau se fait avec le majeur et l’annulaire. Le pinceau reste presque vertical mais est légèrement incliné, de 15 degrés, pour faciliter ses élans. La paume crée un espace creux, comme si on tenait un ouf.
On s’assoit en tailleur ou les jambes décontractées et parallèles, la colonne vertébrale détendue mais pas courbée.
La méditation, juste avant la réalisation de la calligraphie, est très importante et bénéfique pour l’état d’esprit.
Au début du travail créatif on active le Dan Tian du bas (au niveau du ventre) et on fait tourbillonner l’énergie en formant un grand ballon énergétique qui jaillit de la source du Dan Tian du bas et grandit jusqu’à la membrane des clavicules.
En même temps, on active les points Lao Gong (au centre des paumes) jusqu’à sentir une chaleur très forte au niveau des paumes. L’attention portée sur la paume droite, on fait couler l’énergie du Dan Tian du bas à travers la poitrine jusque dans la paume. Nous formons un ballon énergétique dans la paume, le faisons tourbillonner et remplissons le pinceau avec l’énergie. Après une profonde inspiration, nous gardons tout l’air dans l’abdomen, fixons notre attention au bout du pinceau et nous élançons dans la création d’un caractère, en expirant au fur et à mesure que l’on accomplit la calligraphie.
Pour mieux examiner notre création, nous commençons à la regarder en s’oubliant et en cherchant le passage de notre énergie dans ce caractère. On regarde l’espace peint, qui est noir, puis l’espace blanc, en exclurant le caractère. On ferme les yeux et on cherche ce caractère dans notre vision intérieure. On précise sa forme, sa couleur et on retient ses sensations.
Si vous travailler à plusieurs, vous pouvez enrichir vos sensations en échangeant vos créations avec celles de la personne qui a peint à côté de vous. On analyse l’ouvre comme précédemment et on retient ses sensations.
Pour mieux sentir le processus énergétique de la calligraphie, vous pouvez explorer certains caractères en les réalisant à travers des exercices du Qi Gong. Pour la base, il vaut mieux choisir des caractères anciens.
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Exemple : Après des exercices de réchauffement du corps, debout, le corps décontracté, nous commençons la réalisation énergétique du caractère Feng (l’écriture Da Zhuan), le vent. Sur l’illustration figurent les numéros de succession des traits, leur direction de réalisation est toujours de droite à gauche. Nous traçons les traits en appliquant l’énergie de tout notre corps dans l’espace de notre premier cocon. En dessinant le vent, on cherche à percevoir cet élément dans nos corps énergétique intérieur et extérieur. Nos bras sont comme de grands pinceaux et notre énergie est l’encre noire. |
Avec ce travail on commence mieux sentir le mouvement d’énergie dans l’exploration calligraphique et développe nos sensations et notre perception énergétiques.
par Marynka OSTRIV